Okey, courage, on a tous des emmerdes au moins une fois dans sa vie. Certains plus que d'autres, certes, mais là, fallait quand même le faire. Perchée en haut d'un arbre en pleine forêt, pas loin des sources chaudes et surtout complétement paumée, Eden regardait en bas de l'arbre les... Bestiaux, qui l'attendaient. Elle savait pas ce que ce c'était, et, bizarrement, elle avait pas trop envie de le savoir, là. Bon, elle adorait les animaux, et elle avait un très bon contact avec eux, là n'est pas la question. Elle avait rien fait en plus. Et puis quelle idée de merde aussi, pourquoi était-elle venue se paumer ici en plein week-end hein ? Y'a personne, résultat, elle flippe deux fois plus, est au bord de la crise de nerfs et a quatre vingts dix pour cent de chance que sa fucking phobie se déclenche. La joie hein ? Enfin elle était tellement focalisée sur les animaux - ou ce qui y ressemblaient - en bas de l'arbre qu'il y avait peu de chance qu'elle pète un boulon. Pourquoi faut-il qu'elle se mette toujours dans ce genre d'histoire ? Pourquoi faut-il qu'elle soit toujours malchanceuse ? En bref, pourquoi ?

Prenant un soudain intêret pour le ciel, de beaux nuages blancs étaient présents, un aspect cotonneux like de la barbe à papa. Bleu et blanc, on dirait le logo de Skype. Rien à voir ouais, mais c'était la seule référence qui était passée par la tête du citron. Y'avait également une brise fraiche, pas désagréable avec cet été de malade. La chaleur était juste insoutenable. Eden n'avait donc pas hésité une seule seconde sur le choix de sa tenue : Robe blanche qui lui arrivait un peu au dessus des genoux, avec un ruban bleu sous la poitrine et des ballerines assorties, donc blanches avec une petit noeud blanc sur chacune d'entre elles. Et là, une question - visiblement existencielle - traversa la tête de la jeune fille.


C'est en réfléchissant à tout ça, et évidemment, en flippant d'avantage, que le ventre de la jeune fille se fit entendre. Une espéce de " GROUIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIC " se fit entendre. Tellement bruyant que les bestiaux en bas prirent la poudre d'escampette.



Retrouvant son grand sourire habituel, la gamine descendit de l'arbre, toute contente, mais crevant la dalle. Et en plus paumée. Entendant un bruit d'eau pas loin, elle commença à marcher, après avoir ramasser sa clochette qu'elle rattacha à son cou. Cette dernière tintait à chaque pas, ne rendant pas son déplacement très discret voir pas du tout en fait. Plus elle avançait dans l'espoir de sortir d'ici, plus elle s'enfonçait dans ses emmerdes. Et quand elle arriva devant une cascade...


Elle s'avança vers l'eau et mis un pied dedans, frissonnant au contact du liquide contre sa peau, mais son sourire s'agrandit d'avantage. L'eau était juste trop supra méga bonne comme elle aurait dit. Décidant de faire trempette, elle se recula pour enlever ses vêtements mais elle percuta un truc et fit un bond de trois mètres, tombant au sol et se retournant vivement vers le truc. Et après réfléxion, le terme gens à cheveux de glace à l'eau de mer serait plus approprié. Elle détailla celui qui se trouvait devant elle en clignant plusieurs fois des yeux, et tout ce qu'elle trouva à dire ce fut ça.

Lorsqu'on est un utilisateur de la cryokinésie, le don de changer les choses en glace par le simple toucher, je peux vous dire qu'on préfère se tenir loin des piscines ou autres points d'eau naturels pour éviter de réduire leur nombre par maladresse. Ainsi, dans l'intérêt commun, on préfère réduire son propre plaisir aquatique. Avec mon intelligence surnaturelle et ma maturité à tout casser, en plus d'un ennui inégalable en cette journée, j'avais décidé d'aller à la piscine pour me divertir. De ce fait, je m'étais levé assez tôt, et après quelques minutes - ou heures, difficile de faire le compte du temps - passées sur une console de jeu, je m'étais dirigé vers la piscine la plus proche. Ne faisant pas vraiment attention à ma tenue - muni d'un short de bain et d'une serviette, le tout fourré dans mon sac de sport, j'avais entamé un trajet vers l'endroit.
Seulement, ceux qui connaissaient un minimum l'endroit savait ce que j'y avais provoqué la dernière fois : un gel total d'un tiers de la surface aquatique, si bien qu'on avait dû ramener quelqu'un avec un don apte à dégeler ma glace. Une poisse simplement royale, je vous dis. Je ne fus donc pas surpris de voir, une fois arrivé sur place, l'adulte responsable de l'endroit me refuser entrer d'un mouvement de tête. J'étais assez vexé, même si quelque chose comme ça se comprenait, et me contentais de faire volte-face en soupirant. Le début du week-end, et déjà tant de problèmes. Fallait-il vraiment que je me fasse avoir de cette façon, si facilement ?

J'allais faire demi-tour, lorsque je songeais à une autre alternative : tous les week-end, un bus partait en direction des Sources Chaudes. Pourquoi ne pas aller se relaxer là-bas ? En soi, l'idée n'était pas mauvaise, j'espérais simplement que l'accès ne me serait pas bloqué. Ainsi, une fois dans le bus, je fus agréablement surpris de voir que ce dernier était vide, me donnant de ce fait une totale liberté. Le trajet fut donc pour le moins agréable, et je manquais même de m'endormir à maintes reprises, tellement le calme était pesant.
Finalement, je débarquais près des sources chaudes et remerciais le chauffeur. Sortant calmement du bus à la manière du mec de mission impossible lorsqu'il marche genre trop classe, je glissais et m'étalais alors au sol. Une fois remis de cette chute improvisé et de nouveau sur mes pieds malgré mes cheveux pleins de feuilles et divers éléments de la nature que nous ne citerons pas, je me relevais et me dirigeais de nouveau vers l'endroit.

Je ne pus m'empêcher de paraître surpris en remarquant une cascade près des sources chaudes, un élément que je n'aurai jamais soupçonné - même si le bruit était dans mes oreilles depuis maintenant cinq minutes, oui. Je m'apprêtais à me changer lorsque je remarquais présent dans l'eau, une demoiselle vêtue d'une robe blanche, qui me tournait le dos. Alors, cet endroit n'était pas vraiment vide, ça n'avait rien d'étonnant. Je m'avançais donc silencieusement vers l'entrée aussi, posant mon sac contre un arbre, m'approchant de l'eau.
Seulement voilà, c'est ce moment que choisit la demoiselle pour sortir de l'eau et me percuter ainsi avec un certain manque de violence - qui ne l'empêcha pas de faire un putain de bond. Gentil comme j'étais et faisant montre d'une galanterie à toute épreuve en plus d'avoir des chevilles minces, je lui attrapais la main et tirais doucement pour la redresser.

- Désolé, je suis maladroit. Et je suis pour les citrons.

La jeune fille ne percuta pas tout de suite que le garçon lui tendait sa main pour l'aider à se relever. Elle était trop heureuse. Beaucoup trop heureuse. Il était pour. Il était pour la sauvegarde des citrons. Elle avait une furieuse envie de l'embrasser pour le remercier, mais ici, il paraît qu'elle devait se retenir. Alors elle le fera pas. Elle détailla un peu mieux celui qui se trouvait devant lui, toujours à terre. Cheveux bleux foncés, presque noirs, des yeux d'un noir profond, il était mignon. Pas "canon", mais au moins "mignon". "Gentil". Voilà, il était classé. Oui, Eden classe les gens, y'a les "Gentils" et les "Pas gentils". Une vraie gamine, je vous l'ai dit. Malgré ça, on l'adore Eden - je crois -. Se saisissant finalement de la main qu'on lui tendait, elle se releva et épousseta sa robe, dans l'intention de faire tomber les diverses brindilles et autres qui étaient venues s'y nicher.Une fois ceci chose faite, elle regarda le jeune homme et sourit grandement, faisant tinter sa clochette à nouveau, laissant son air de gamine sortir une fois de plus.


Elle partit en direction de l'eau et aperçu un sac près d'un arbre, bien qu'il soit dans la direction opposée. Elle y fit trop attention, ne regardant plus où elle allait, et s'étala pitoyablement par terre. Restant un moment ainsi, ayant la grosse flemme de se redresser, elle finit par le faire, en fronçant les sourcils et regarda la pierre sur laquelle elle avait trèbuché.


Du grand n'importe quoi. Elle se releva - encore une fois - et épousseta sa robe - encore une fois -. Finalement, elle retourna vers le jeune homme et sourit.



Très pertinant Eden. Surtout lorsque l'on sait que ces sources chaudes ont été crées spécialement pour les élèves d'Aomori par le directeur. Non mais quelle gourde...

Si l'on me demandait mes goûts en matière de femme, je répondrais immédiatement que je préférais les brunes. C'est vrai, une blonde c'est stupide, même si les cheveux blonds c'est plus beau, et une femme stupide, même si cet adjectif est dans la définition du mot auquel il est affilé, ça n'engage rien de bon. C'est ainsi que je revis mon point de vue sur la gente féminine, me faisant la promesse silencieuse de ne plus croire aux clichés étant donné que, paradoxalement avec ce que j'avais énoncé plus tôt, j'avais croisé une demoiselle qui était loin d'être blonde, mais dont l'intelligence s'en rapprochait énormément.
Comprenez que, pour moi vil inconnu qui venait d'arriver en ces lieux, voir une demoiselle me fixer avec des yeux qui mélangeait le Yoshi et un Goupix lambda, il y a de quoi se poser des questions - et j'espérais seulement pour elle qu'elle ne résultait pas de l'union de ces deux bestioles. C'était comme si ma réponse à sa stupide question sur les citrons avait changé le cours de lycée - même s'il est vrai que ma magnifique personne ferait la une des journaux pour avoir répondu à une question, bien que celle-ci... Mais passons outre ce débat sur cet aliment jaunâtre et acide qui servait de deuxième prénom à cette demoiselle.

Eden, qu'elle disait, un prénom qui me rappelait immédiatement que j'avais totalement oublié de me brosser les dents, ce matin. En plus de ça, j'avais la magnifique chance de posséder ce qui semblait être des crocs, puisque pointues, qui avaient tendance à attirer l'intention des autres. Comme s'ils avaient jamais vu un schizophrène cryokinégiste à moitié cleps de leur vie. Si l'on devait me poser la question, je répondrais que ça valait mieux d'être un citron, bien que cette réponse risquait de m'attirer les foudres de la demoiselle actuellement en ma compagnie.
Enfin, peut-être pas si actuel, puisque elle avait très bien pu s'arracher la moitié des organes cérébraux en trébuchant sur cette pierre - permettant ainsi à mes oreilles un peu de repos. Vous pouvez penser que je suis un sadique, mais j'étais juste blasé en cet instant, si bien qu'un pingouin aurait pu sortir de l'eau que je ne m'en serai pas étonné. Je réussis pourtant à marmonner une réponse, qui se casait entre l'aboiement et le cri d'un lama.

- Oui, je suis d'Aomori. Akira Shimizu.

Heureusement, j'avais masqué ce soudain élan sonore - sûrement sorti des abysses de ma gorge - par cette réponse presque immédiate, espérant ainsi laisser penser qu'il n'était pas de moi. Il s'agissait en effet d'un plan machiavélique très bien travaillé sur l'étendue d'un demi-seconde, qui tenait davantage du réflexe qu'autre chose, à vrai dire.
C'est finalement avec l'agilité d'un chameau polaire avec sûrement une dizaine de sacs de farine sur le dos que je me redressais, me dirigeant vers mon sac. Il n'avait rien de spécial, noir, basique et avec un maillot de bain à l'intérieur, et à moi d'avoir des yeux ultraviolets à rayon X, il était impossible que quelqu'un y trouve un intérêt. Pourtant, c'était en le fixant tout en marchant dans l'eau qu'Eden avait réussi à trébucher. Are you fucking kidding me ? Il faut croire que ce narrateur se fichait littéralement de ma gueule, ou bien qu'il avait jugé bon de me foutre dans la merde en me mettant en face de la personne la plus bizarre au monde. Pourtant, il ne fallait me sous-estimer, puisque j'étais capable de garder mon calme en toute situation.
Je retirais mon haut et tiltais soudainement. Pourquoi fallait-il que j'aie croisé une fille ? Tant pis, après tout, j'irais comme ça. J'ôtais donc mon pantalon et allais dans l'eau en caleçon. Au départ, je voulais rentrer lentement tel un héros, mais la chaleur m'arracha un cri qui n'avait rien de viril, faisant ressortir mon côté féminin. Tout cela commençait bien.

- Fuck, c'est à 120° ou quoi ?!

Nom de Dieu, Eden, comment avais-tu encore une fois réussit à te retrouver dans une situation improbable ? D'abord, te faire entourer par des machins sauvages, puis les faire fuir avec le bruit de ton estomac - qui te tenaillait toujours d'ailleurs -, trouver une cascade sublime et finalement faire la rencontre d'un jeune homme qui te prenait pour une abrutit finie ? C'est p'têtre le cas mais tout de même, enfin non t'es pas conne mais bref on s'embrouille là. Shimizu Akira, tu notais ce nom dans le coin de ta tête, ça pourrait toujours t'être utile après tout. Il n'avait pas l'air méchant, ce gosse, mais il t'intriguait tout de même. Tu pensais un peu un peu à comment tu en étais arrivé là, et au fait que bon Dieu tu crevais la dalle ! D'ailleurs, tu n'avais pas emporté de quoi manger ? C'est rare tiens... Ah mais si, dans l'une des poches de ta robe, tu avais des bonbons ! Tu enlevais l'emballage d'une des sucreries quand un cri très peu masculin te perça les tympans. Tu regardas l'autre type. En calecif, il se croit à la plage ? Bah, tu t'en fous après tout. Il s'énervait contre la chaleur de l'eau, il est pas normal lui. Puis tu mangeas ton bonbon d'une traite et tu enleva ta robe, sans gêne, vraiment aucune, te retrouvant en sous-vêtements. Tu attachas tes cheveux encore plus haut qu'ils ne l'étaient déjà et tu alla dans l'eau tranquillement, une sucette dans la bouche prise entre-temps.

Tu ne voyais pas ce qu'il reprochait à l'eau, elle était très agréable à cette température. Tu nageais tranquillement, comme si le fait que tu sois dans l'eau, en sous-vêtements ( noirs, heureusement pour toi. ), avec un garçon à peu près de ton âge en caleçon était tout à fait normal. Eden, tu es très étrange, vraiment. Ne te gênant pas le moins du monde pour chantonner un petit air, tu regardais le ciel, allongée dans l'eau. Il faisait pas très beau aujourd'hui, tu redoutais qu'une pluie et des éclairs arrivent, tu n'aurais pas l'air très fine. Surtout qu'à la base, t'es paumée, en pleine forêt. Et que t'as intérêt à rentrer ce soir avant le couvre-feu si tu veux pas te faire dézinguer avant l'heure. Lâchant la vue du ciel pour plonger sous l'eau, tu ressortis de l'eau et regarda par terre. Il y avait une fourmilière. C'est fou. Franchement. Toutes ces petites fourmis qui se précipitent pour satisfaire leur reine... Incroyable. Retournant vers ta robe, tu choppas un autre bonbon que tu mangeas puis tu te tournas vers le jeune homme, deux sucreries dans les mains.

Parmi les sept milliards d'humains que l'on pouvait trouver sur cette foutue planète, c'est bel et bien sur moi que l'éventuel dieu au dessus de nous avait décidé de s'acharner : vous l'aurez compris, je m'étais encore fourré dans une situation des plus bizarres, alors que je n'avais pourtant rien demandé. Je devais sûrement me résoudre au fait que, lorsque je cherchais à être tranquille, la situation allait sans cesse me retomber dessus. J'étais parti pour me baigner dans des sources chaudes, près d'une cascade loin du pensionnat - du fait que la piscine m'était personnellement interdite à cause de mon pouvoir, et au final, j'avais droit à la compagnie d'une personne les plus bizarres au monde.
Pourquoi ne pouvais-je pas avoir près de moi une personne sympathique, qui se contentait de faire trempette sans un mot - et celui qui suggère Magicarpe, je le tue ? Je me le demandais. Finalement, je me contentais de l'observer sans rien dire, tandis qu'elle s'avançait dans l'eau sans un mot. Peut-être que tout allait pouvoir se passer tranquillement. Je m'apprêtais à m'éclipser doucement pour partir me baigner de l'autre côté, quand elle finit une chose surprenante : elle retira sa robe. Narmol.

« Ohé, qu'est-ce que tu fous ?! Ne retire pas ta - ... »

Et à peine j'eus le temps de finir ma phrase que l'habit était déjà retiré et posé ailleurs. Je dus tourner la tête pour m'efforcer de me contrôler, malgré le fait que mes joues se soient déjà teintes de rouge. Elle n'était pas pudique celle-la, c'était bien ma veine. S'il y avait bien une situation que je craignais, c'était celle-là, et il fallait que ça me tombe dessus le jour où j'avais envie de me reposer. Je savais qu'à chaque fois que je voulais avoir la paix, les problèmes n'étaient jamais loin du fait de ma poisse hors du commun.
Seulement, parmi toutes les possibilités, il fallait que j'aille à l'encontre de la pire possible, que je n'avais même pas eu le bon sens de voir venir, même si je la craignais plus qu'autre chose. Je sentis mon corps frissonner légèrement, tentant au mieux de refouler cette sensation qui s'emparait de mon corps. Non, ça ne pouvait pas arriver, ça ne devait pas arriver ! Je posais mon regard sur les alentours, tentant de penser à autre chose. Ou foutre le bordel dans ma tête, c'était toujours mieux. La beauté de la nature, la cascade...

Le fait qu'elle s'adresse à moi capta mon attention à nouveau. Visiblement insensible à son propre geste, elle s'était même prit un bonbon qu'elle dévorait tranquillement tout en restant dans l'eau. Ok, alors c'état comme ça ? Enfin, si je voulais avoir l'air méchant, c'était rapé : quelqu'un qui me fixe en me tendant un bonbon pour me demander si j'en veux, je ne peux pas le traiter en mal. Lui adressant un « Merci », j'attrapais la sucrerie que j'observais un moment. Malgré moi, mon regard se dirigea sur elle, détaillant chaque partie de son corps. Ce fut surement la plus grosse erreur que je n'ai faite aujourd'hui. Je sentis mon corps frissonner à nouveau, mon regard se perdre, mon esprit sombrer, et je n'étais plus moi.
Qu'est-ce que j'avais bien pu foutre pour me trouver dans ce bled paumé ? Une vieille cascade de merde, une gamine en plein délire avec son bonbon qui avait une gueule à trébucher tous les huit mètres, et un bonbon dans ma main. Je ne tardais pas à balancer ce dernier une fois qu'elle eut le dos tourné, m'avançant pour la regarder, un sourire narquois aux lèvres. Pourquoi se faire chier à attendre ? Je glissais ma main sur la surface de l'eau, la changeant très légèrement en glace sur le dessus, sur une toute petite zone.

« Yo... Si tu te fais chier, on fait un jeu. Celui qui crève le premier dans l'eau a perdu. »

Mais qu'est-ce que je foutais ici ? Dans cet endroit reculé du monde et de toute civilisation, ce trou paumé au milieu de nulle part avec pour seule compagnie une fille cheloue aussi intelligente qu'un rat qu'on aurait trouvé dans un fossé en bordure de route ? C'était à peu près la première impression que j'avais eue à la vue de cette fille, qui n'avait aucune gêne quant au fait de se balader dans un lac en sous-vêtements, une sucette dans la bouche. En plus de ça, et c'est le détail qui confirmait son extrême stupidité, elle avait refusé mon jeu ! Qui avait-il de mal à refroidir la température de l'eau pour faire de son bain quelque chose d'un peu plus divertissant ?
Les gens étaient-ils vraiment si effrayés que ça par l'eau ? C'était déplorable. Quelques degrés en plus et on se plaignait ! Même si son apparence laissait à penser qu'elle ne l'était pas, cette fille était pour moi une simple enfant, bien que l'expression de son visage laisse transparaître son côté enfantin. Pourtant, les enfants restaient à mes yeux les êtres les plus idiots, c'est pourquoi son refus ne manquait pas de m'étonner, et de me révolter.

Je restais silencieux, la regardant longuement, l'expression amusée de mon visage ayant cédé place à un air sérieux. Pourquoi les gens tentaient-ils toujours de réfuter tout contact avec moi ? Leur peur de l'inconnu était-elle donc grande au point de les brider de toute liberté ? Cette seule pensée m'énervait. Elle m'énervait au point que je sente mon regard se durcir de lui-même, s'enflammer, comme si une brusque colère y avait prit place. Si on devait donner une cause à celle-ci... il n'y en aurait pas. La folie prenait à nouveau place en moi, mon impulsivité était plus forte que jamais, je bouillonnais littéralement. Comme si je n'avais pas digéré son refus. Comme si j'avais moi-même refusé le fait qu'elle mette de côté ma proposition.
Et je finis par craquer. Un violent coup de poing vint fendre le morceau de glace que j'avais créé près de moi, envoyant celui-ci au fond de l'eau, brisé en deux morceau identiques. La peau de ma main s'était arrachée à cause de cet acte soudain, laissant quelques gouttes de sang s'écraser dans l'eau. Mais je me fichais de ça. Je me fichais de la douleur qui me prenait de court, et qui ne semblait même pas se faire ressentir.

« OY ! Tu vas chialer pour un putain de jeu ?! Allez, on va s'éclater, fais pas la meuf sage ! »

La politesse n'était pas dans mes principes, et mon langage familier soulevait une question des plus importantes à mon sujet : étais-je un wesh ou une simple racaille ? S'il était possible de donner une troisième réponse, ce serait certainement un mélange des deux, en pire. Je n'accompagnais pas mes mots du moindre geste ou d'une expression qui aurait pu désigner mon appartenance à un quelconque groupe, mais mon ton laissait clairement à penser que j'étais loin d'être une personne amicale. Que, quoi qu'eurent été mes paroles rassurantes, elles auraient paru plus menaçante que n'importe quelle arme en ce monde. Désormais calmé, je permis l'apparition d'un sourire narquois sur mes lèvres, prenant une expression plus dure.
Ma main frôlait à nouveau la surface de l'eau, ne changeant cependant pas cette dernière en glace. L'opération que j'allais faire allait durer un moment, mais les effets allaient se ressentir très vite : la baisse cruelle de température, de part une transformation partielle de l'eau en glace. Déjà, du givre apparut à la surface de ces sources pourtant chaudes, qui ne seraient bientôt plus qu'un tombeau de glace, pour la reine des idiotes.

Mais ça m'avait soulé. J'avais attendu quelque secondes, me rendant finalement compte que cette fille n'était pas plus motivée qu'un pingouin à manger des bananes. Sortant de l'eau, je lui avais adressé un dernier regard avant d'attraper mon sac pour partir loin d'ici. À croire que profiter de la vie n'était pas dans le vocabulaire des gens.